lundi 29 juin 2009

Erythème noueux



___________________Un motif de consultation trés fréquent qui relève de multiples étiologies:

PLAN
Définition- Généralités
Diagnostic positif
Diagnostic différentiel
Diagnostic étiologique
Traitement
conclusion

Définition - Généralités
  • éruption dermohypodermique aiguë
  • non spécifique,
  • apparition sur terrain prédisposé (ATCD familiaux dans 6 % des cas, groupe HLA B8
  • retrouvé dans environ un cas sur deux)
  • Mécanisme: probablement immunologique
  • plus fréquent chez la femme jeune (3 à 7 F/ 1 H)
  • L'âge : 20 à 40 ans
  • avec classiquement un facteur saisonnier(saisons froides).
  • La physiopathologie est actuellement inconnue.

Diagnostic positif
  • clinique:
Une phase prodromique : non spécifique
  • Durée : 3 à 6 jours
  • fièvre
  • douleurs articulaires / abdominales +/-
  • souvent un tableau d’infection rhinopharyngée,
  • une altération légère de l’état général.
Une phase d’état:

s’installe rapidement en 1 à 2 jours
les nouures+++:nodosités dermohypodermiques
- rondes ou ovalaires
- volume variable: de la taille d’un petit pois a celui d’une noix
-couleur rose ou rouge violacée
- sensibles a la palpation voire douloureuses
- Siégent électivement aux faces d’extension des jambes et des genoux, parfois des cuisses et des avant-bras
- Les nodules apparaissent généralement en 2 a 3 poussées ;
- elles sont en petit nombre: 3 à 6 (parfois davantage bilatérales, grossièrement symétriques),
AEG Fiévre arthralgies
L’examen clinique
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ü Permet des préciser les caractères des nouures:
- elles ont 10 à 40 mm de diamètre
- elles sont chaudes et fermes à la palpation, qui accentue leur caractère douloureux
- elles sont mobiles par rapport aux plans profonds.



ü La douleur des lésions est exacerbée par l’orthostatisme, ce qui amène le malade à rechercher spontanément la position allongée avec les jambessurélevées. Un oedème déclive des chevilles est souvent présent
  • Examens biologiques:
Le syndrome inflammatoire biologique:
- La vitesse de sédimentation est accélérée,souvent supérieure à 80 millimètres à la première heure.
- une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles,
- anémie inflammatoire.
- élévation du fibrinogène et des alpha2 globulines

Le reste des perturbations biologiques permettra d’orienter la recherche étiologique.
Histologie:n'est spécifique d'aucune étiologie.
- en phase aiguë une inflammation neutrophilique avec d’importants dépôts de fibrine le long de la jonction dermo-hypodermique et dans les septums interlobulaires de la graisse, puis à son décours une réaction granulomateuse.
- C’est une hypodermite septale neutrophilique et granulomateuse sans lésions vasculaires et lobulaires.
n Evolution et pronostic
ü Après une dizaines de jours, les nodules passent par les teintes violacées et jaunâtres de l’ecchymose (les couleurs de la biligénie)
faisant parler de « dermatite contusiforme »
ü Une nouure se résout en 3 à 6 semaines.
ü Absence de séquelles (ni cicatrice, ni atrophie,ni nécrose)
ü La durée moyenne d'un épisode d'EN est de 6 à 12 semaines.
ü Il existe des formes prolongées
ü Rechutes dans 12-14% des cas (évoquent une maladie sous-jacente)


n DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
  • Au stade de début:
Réaction à une piqûre d’insecte.
Erysipèle: surtout dans les formes dégradées après plusieurs poussées.
Les phlébites superficielles :
- elles siègent sur les trajets veineux, tels les faces latérales des jambes.
- Elles sont dures et irrégulières, ont une évolution fibreuse,
- apparaissent dans un contexte d’insuffisance veineuse chronique.
érysipèle
les phlébites nodulaires:
- se voient dans la maladie de BEHCET+++
- Elles siègent sur les trajets veineux
- n’ont pas une évolution contusiforme.
- histologie: montre la prédominance d’une vascularite avec atteinte des veines
n A un stade évolué: le problème diagnostique se pose avec les autres hypodermites
L’ érythème induré de Bazin:
- terrain: femmes jeunes
- Prédilection pour la saison hivernale
- Caractère non inflammatoire des nodules:nouures confluent pour former des placards infiltrés qui peuvent s’ulcérer
- Évolution: vers la guérison spontanée pendant la saison estivale, puis nouvelle poussée lors de la saison hivernale suivante
- Considère comme tuberculose s/cutanée pauci- bacillaire TRT antituberculeux
La panniculite aiguë fébrile récidivante de Weber-Christian:
- elle se manifeste par des nodules inflammatoires
chez la femme d’âge moyen au niveau des zones riches en tissu adipeux (cuisses, bras, région fessière, abdomen),
- accompagnés de fièvre et d’arthralgies.
- Ces nodules peuvent :se fistuliser et laissent souvent place à une atrophie cupuliforme.
- Des manifestations viscérales peuvent accompagner le tableau cutané
Les nodules sous-cutanés des vascularites:
- La périartérite noueuse+++
- Ils siègent sur les trajets artériels des membres
- Ils sont d’âges différents
- Ils ont tendance a l’ulcération et a la nécrose
Les sarcoïdes hypodermiques : ce sont des nodules froids sous-cutanés réalisant un aspect en peau d’orange.
Les panniculites des maladies systémiques:
(LED; PR; sclérodermie;la dermatopolymyosite)
- Localisées le plus souvent sur les extrémités,
__________________

- Les lésions sont inflammatoires et peuvent évoluer vers l’ulcération en laissant une cicatrice atrophique.
Autres:
- Les panniculites physiques
- Les panniculites infectieuses(rares):infections à Pseudomonas, à Staphylocoque doré, de la tuberculose ou d’infections fongiques systémiques
- Les nodules des embolies des cristaux de cholestérol (se voient essentiellement au cours de la maladie athéromateuse +++)
n DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
Ø Dans 25 % des cas, aucune étiologie n’est retrouvée.
Ø L’infection streptococcique : +++
- retrouvée 1 fois sur 5.
- Ni la clinique ni la biologie n’en sont spécifiques.
- Dc:
arguments cliniques: caractère très inflammatoire ou confluents des lésions, rechutes ou récidives rythmées par les épisodes d’infections ORL
Arguments biologiques:
- isolement du streptocoque bêta hémolytique du groupe A dans la gorge (il existe cependant des porteurs sains) et présence d’anticorps anti-streptococciques.
Ø La tuberculose:
- L’EN fait partie du tableau de primo infection
- fièvre, les sueurs nocturnes, AEG, la notion de contage, le virage récent des tests tuberculiniques, la présence d’un chancre d’inoculation
- Adénopathie médiastinale à la radiographie pulmonaire et la kérato - conjonctivite phlycténulaire.
- On peut également retrouver une tuberculose pulmonaire ou extra-pulmonaire évolutive.
Ø La sarcoïdose:
- L’EN en est un mode de révélation fréquent,
- est retrouvé en particulier au cours du syndrome de Lofgren qui y associe :
une anergie tuberculinique,
des adénopathies médiastinale;
et des arthralgies.
- intérêt du: TLT;TDM thoracique; LBA avec contage des lymphocytes
- DC de certitude: histologie+++
lorsqu’on retrouve sur une biopsie bronchique ou des glandes salivaires accessoires un granulome épithélio-giganto-cellulaire sans nécrose caséeuse.
Ø Les yersinioses:
- des manifestations digestives précèdent l’éruption sous forme d’une :diarrhée avec douleurs abdominales avec même parfois un tableau pseudo chirurgical.
- La coproculture n’est que rarement positive.
- Le diagnostic est sérologique, et repose sur l’augmentation du taux d’anticorps spécifiques à 15 jours d’intervalle.
- Il s’agit de Yersinia enterocolitica pour l’adulte, et de Yersinia pseudo tuberculosis chez l’enfant.
Ø Autres maladies infectieuses:
- Chlamydiae mycoplasme rickettsie brucella Histoplasma lèpre MNI hépatite B rougeole
- grippe paludisme toxoplasmose trypanosomiase
Ø Les colites inflammatoires:
- L’EN est une lésion classique de la maladie de Crohn et de la recto-colite hémorragique.
- Il précède rarement les manifestations digestives
Ø Autres maladies systémiques:
- LED PR Maladie de BEHCET Maladie de TAKAYASU Maladie de HORTON
- Le contexte clinique permet souvent de poser le diagnostic.
Ø Causes médicamenteuses et toxiques:
- Les Cyclines triméthoprime phénacétine salicylés Pyrazolés D-pénicillamine
- amiodarone sels d’or contraceptifs oraux iodures bromures
Ø Les affections malignes exceptionnellement:
- Maladie de HODGKIN,
- Lymphome malin non Hodgkinien,
- leucémie aiguë myéloïde,

- leucémie lymphoïde chronique,
- ou encore carcinome rénal.
Ø La grossesse
n EN PRATIQUE
ü Le diagnostic positif est avant tout clinique ; quand il ne fait aucun doute, on doit d’emblée réaliser le bilan étiologique.
ü Celui-ci comporte au moins :
dosage des ASLO et antistreptodornases,
IDR à la tuberculine, radiographie thoracique,
prélèvements bactériologiques (gorge et selles)
recherche et culture de BK sur crachats et tubages gastriques au moindre doute de tuberculose.
En fonction du contexte, les examens bactériologiques et sérologiques seront étendus et éventuellement répétés
l’exploration digestive sera justifiée par les éventuels signes d’appel des entéropathies inflammatoires.
S’il existe un doute diagnostique la biopsie cutanée large et profonde s’impose.
n TRAITEMENT
Ø Le traitement doit être étiologique avant tout.
Ø En attendant, un traitement symptomatique peut être mis en œuvre :
- le repos en décubitus et la contention veineuse sont recommandés.
- voire colchicine ou anti-inflammatoires non stéroïdiens dans les formes prolongées.
n Moyens thérapeutiques
v Au cours de la phase algique de la maladie, on peut prescrire des antalgiques :
- paracétamol, 1 à 3 g/24 h, en espaçant les prises de quatre heures minimum ;
- acide acétylsalicylique, 2 à 4 g/24 h pendant 7 à 15 jours.
v Les AINS sont réservés aux formes comportant des arthralgies importantes :
- indométacine (Indocid®, gélules à 50, 100 mg). La posologie est de 50 à 150 mg/24 h en doses fractionnées
- naproxène (Naprosyne®, comprimés à 250, 500, 750 et 1 000 mg, suppositoires à 250, 500 mg). La posologie est de 250 mg deux fois par jour lors des repas.
- Les AINS améliorent rapidement les signes inflammatoires locaux ; ils seront prescrits pour une durée moyenne de 10 jours.
v L’iodure de potassium (en gélules à 100 mg ou en solution), à la posologie de 300 mg/j pendant 7 à 15 jours, est un traitement efficace et rapide mais qui n’est plus guère utilisé actuellement.
v Dans les formes communes, le recours à la corticothérapie générale n’est pas justifié.
Ø TRT étiologique
Infections à streptocoque b-hémolytique:
- antibiothérapie générale : pénicilline V (Oracilline®, Ospen®, comprimés dosés à 1000 000 UI, sachets de poudre à 500 000 UI, suspension buvable à 250 000, 500 000 UI/dose).
- La posologie habituelle est chez l’adulte de 3 à 4 millions d’UI/j pendant au moins 15 jours. Chez l’enfant, elle est de 100 000 UI/kg/j.
Sarcoïdose
- L’EN au cours de la sarcoïdose est un marqueur de bon pronostic.
- Sa résolution spontanée en 2 à 3 semaines est la règle, justifiant l’abstention thérapeutique dans la plupart des cas. Le recours aux AINS est justifié en cas d’arthralgies importantes.
- Dans les rares formes prolongées ou associées à une atteinte pulmonaire sévère, la corticothérapie générale à la dose de 0,5 mg/kg/j est indiquée.
TUBERCULOSE
- antituberculeux+++
YERSINIOSES
- l’antibiothérapie générale :
- cyclines : doxycycline, minocycline. La posologie est 200 mg/j pendant 15 jours ;
- ciprofloxacine : Ciflox® (comprimés à 250, 500 et 750 mg). La posologie est de 1 g/j en deux prises quotidiennes au cours des repas
MÉDICAMENTS:Toute suspicion d’érythème noueux « médicamenteux » impose l’arrêt du traitement en cours.
ENTÉROPATHIES INFLAMMATOIRES CHRONIQUES:
- Le repos + TRT de la poussée digestive entraîne souvent la régression des lésions cutanées. Les AINS, la colchicine et l’iodure de potassium peuvent être prescrits
n CONCLUSION
ü L'érythème noueux est une affection bénigne en elle-même
ü Le diagnostic est clinique.
ü Ses étiologies sont nombreuses, dominées par la tuberculose et l’infection streptococcique.
ü Il faut cependant s’acharner à retrouver l’étiologie dans les cas récidivants au cas par cas, afin de proposer un traitement adéquat.



_________________________________________Points clés
1. .L érythème noueux est une hypodermite nodulaire aiguë évoluant toujours sans séquelles.

2. . La symptomatologie clinique est stéréotypée quelle que soit la cause.

3. . L aspect histologique est stéréotypé quelle que soit la cause et permet seulement le diagnostic différentiel avec les autres hypodermites nodulaires.

4. . La biopsie d un érythème noueux ne fournit pas d arguments étiologiques.

5. . La survenue d un érythème noueux reste inexpliquée dans 15 p. 100 à 55 p. 100 des cas selon les séries publiées.

6. . Les 3 principales causes en France sont l infection à streptocoques béta-hémolytiques, la sarcoïdose (syndrome de Löfgren) et les entéropathies infectieuses (yersinioses) ou inflammatoires.

7. . La cause streptococcique est difficile à démontrer et à affirmer.

8. . En urgence, le traitement symptomatique (repos alité, antalgiques, A.I.N.S.) prime sur le traitement de la cause.

9. . Les récurrences sont rares et pourraient orienter vers une cause infectieuse (streptococcique) ou médicamenteuse.

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